Preuve de Présence à l’Enregistrement et Indemnisation des Retards de Vol : Application du Règlement (CE) n° 261/2004

Une passagère disposait d’une réservation confirmée pour un vol aller-retour de Bordeaux à Lisbonne. Lors du vol retour, l’avion a accusé un retard de 4 heures et 17 minutes à l’arrivée.

La passagère a alors demandé la condamnation du transporteur aérien au paiement de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004, ainsi que des dommages-intérêts pour résistance abusive. Cependant, le tribunal d’instance d’Aulnay-sous-Bois a rejeté ses demandes au motif qu’elle n’avait pas prouvé s’être présentée à l’enregistrement pour le vol en question. Mme C. a formé un pourvoi en cassation contre ce jugement.

Selon Mme C., le refus d’indemnisation constituait une violation de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et des articles 73 et 74 du code de procédure civile. De plus, le refus d’ordonner à la compagnie aérienne de produire les éléments relatifs à l’enregistrement des passagers constituait une violation des articles 3, §2, 6 et 7 du règlement (CE) n° 261/2004, ainsi que de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Enfin, l’exigence d’une carte d’embarquement constituait une erreur dans l’application des dispositions du règlement (CE) n° 261/2004 concernant la présentation à l’enregistrement.

La Cour de cassation a cassé et annulé le jugement rendu par le tribunal d’instance d’Aulnay-sous-Bois. Elle a jugé que le tribunal avait mal appliqué l’article 3, paragraphe 2, sous a) du règlement (CE) n° 261/2004, en ne vérifiant pas si le transporteur aérien démontrait que Mme C. n’avait pas été transportée sur le vol retardé en cause. Selon une ordonnance de la Cour de justice de l’Union européenne, les passagers d’un vol retardé de trois heures ou plus ne peuvent pas se voir refuser l’indemnisation au seul motif qu’ils n’ont pas prouvé leur présence à l’enregistrement, sauf preuve contraire fournie par le transporteur aérien.

Depuis cet arrêt, la preuve d’enregistrement ne constitue plus une condition d’indemnisation.

Références : Arrêt n° 19-13.016 de la Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 octobre 2020, publié au bulletin.

 Exclusion de l’indemnisation en cas de retard de vol pour les passagers voyageant gratuitement

Les passagers voyageant gratuitement peuvent-ils prétendre à l’indemnisation forfaitaire prévue par le règlement (CE) n° 261/2004 en cas d’annulation ou de retard de vol ? 

La Cour de cassation a répondu par la négative en rejetant le pourvoi formé par des parents contre un jugement du tribunal d’instance d’Ivry-sur-Seine.

Un couple avait réservé un vol pour eux-mêmes et leurs trois enfants mineurs pour le trajet Agadir-Paris, prévu le 4 mai 2018. À la suite de l’annulation du vol, la famille est arrivée à destination avec un retard de 22 heures et 28 minutes. Si le couple a obtenu une indemnisation de 400 euros chacun, ainsi que pour deux de leurs enfants, la compagnie aérienne a refusé de verser cette indemnité pour leur troisième enfant, en raison de son jeune âge et des conditions de voyage.

Les parents ont donc formé devant le tribunal d’instance d’Ivry-sur-Seine une demande d’indemnisation pour leur enfant mineur, laquelle a été rejetée. Le tribunal a estimé que, voyageant gratuitement sur les genoux de sa mère, l’enfant ne pouvait prétendre à l’indemnisation forfaitaire prévue par le règlement (CE) n° 261/2004, car il ne disposait ni de billet d’avion ni de carte d’embarquement.

La Cour de cassation a confirmé cette décision, statuant que, selon l’article 3, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 261/2004, les passagers voyageant gratuitement sont exclus du champ d’application du règlement. Elle a précisé que la gratuité, même prévue dans une offre accessible au public, exclut le droit à l’indemnisation.

Ainsi, contrairement à un vol international soumis à la convention de Montréal de 1999 dont l’article 1 relatif au champ d’application prévoit que la présente convention s’applique à tout transport international de personnes, bagages ou marchandises, effectué par aéronef contre rémunération et également aux transports gratuits effectués par aéronef par une entreprise de transport aérien, le transport gratuit est exclu de l’indemnisation prévue par le règlement (CE) n° 261/2004, précisant les conditions de cette exclusion et confirmant une interprétation stricte des dispositions relatives aux indemnités en cas d’annulation ou de retard de vol.

Référence : Cour de cassation – première chambre civile – 6 janvier 2021 – 19-19.940

Requalification d’un Vol Avancé en Annulation par la Cour de cassation : Application Stricte du Règlement (CE) n° 261/2004

Un passager avait acheté plusieurs billets d’avion pour lui-même et des membres de sa famille. Le vol initialement prévu le 16 août 2021 à 15h35 avait été avancé à 10h30, empêchant ainsi le passager et sa famille de le prendre. De plus, les billets pour un autre vol prévu le 27 août 2021 avaient été annulés. En conséquence, le passager avait poursuivi la compagnie aérienne pour obtenir une indemnisation, se fondant sur le règlement (CE) n° 261/2004.

Le tribunal judiciaire de Nantes avait rejeté les demandes d’indemnisation du passager. Il avait estimé que le passager ne rapportait pas la preuve de l’annulation ou du retard des vols réservés. Le tribunal avait constaté que le vol initialement prévu à 15h35 avait été avancé à 10h30, mais avait conclu qu’il n’avait été ni retardé ni annulé, de sorte que les dispositions du règlement (CE) n° 261/2004 ne pouvaient s’appliquer.

Opposé à cette interprétation juridique de la notion d’annulation de vol, le passager a formé un pourvoi devant la Cour de cassation, portant sur la question de savoir si un vol avancé de plus d’une heure peut être considéré comme annulé selon le règlement (CE) n° 261/2004, ouvrant droit à indemnisation.

La Cour de cassation a décidé qu’en application des articles 2 et 5 du règlement (CE) n° 261/2004, un vol avancé de plus d’une heure doit être considéré comme annulé. En requalifiant un vol avancé de plus d’une heure comme étant « annulé » au sens du règlement (CE) n° 261/2004, la Cour a ainsi reconnu le droit des passagers à une indemnisation.

En reconnaissant qu’un vol avancé de plus d’une heure doit être traité comme une annulation, la Cour de cassation renforce les droits des consommateurs et la responsabilité des compagnies aériennes pour les litiges similaires à l’avenir conformément à la jurisprudence européenne (affaires jointes C-146/20, C-188/20, C-196/20 et C-270/20). 

Référence : Cour de cassation, première chambre civile, 31 janvier 2024, n° 22-21.56

L’ajout d’une escale imprévue n’est pas une annulation de vol 

Une passagère a acheté un billet d’avion auprès de la société Air France pour un vol Mulhouse – Conakry via Paris, prévu le 19 avril 2014. L’itinéraire a été modifié par l’ajout d’une escale à Dakar, ce qui a retardé l’arrivée à Conakry à 20h31 au lieu de 15h55. 

Elle a de ce fait demandé une indemnisation au titre de l’article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 pour annulation de vol.

Ce qui lui a été accordé. Air France a formé un pourvoi en cassation contre ce jugement, soutenant que la modification d’itinéraire avec une escale imprévue ne constituait pas une annulation de vol, car le vol avait atteint sa destination finale. 

Ainsi, la condamnation pour annulation de vol violait les articles 2, sous l), 3, §2, sous a), et 7 du règlement (CE) n° 261/2004.

Cet arrêt précise l’interprétation de l’annulation de vol et confirme que l’ajout d’une escale imprévue n’est pas une annulation de vol. 

Référence : Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 octobre 2019, n° 18-20.490.

L’employeur a qualité à agir en responsabilité contre le transporteur aérien pour les retards de vol de ses employés passagers : une décision clé de la CJUE

L’employeur de personnes transportées en tant que passagers, ayant conclu un contrat de transport international avec un transporteur aérien, a qualité pour agir contre ce dernier en réparation du dommage résultant du retard des vols effectués par ses employés en application de ce contrat. Ce droit s’étend aux frais supplémentaires exposés par l’employeur. 

Le Service des enquêtes spéciales de la République de Lituanie (Lietuvos Respublikos specialiųjų tyrimų tarnyba) a été confronté à cette situation après avoir acheté des billets d’avion via une agence de voyages pour une mission professionnelle de Vilnius à Bakou, avec des escales à Riga et Moscou. Le vol reliant Riga à Moscou ayant subi un retard, l’arrivée à Bakou s’est effectuée avec plus de quatorze heures de retard par rapport à l’horaire prévu. Ce retard a obligé le Service des enquêtes à payer des indemnités journalières et des cotisations sociales supplémentaires pour un montant total de 1 168,35 litas lituaniens (environ 338 euros). Air Baltic Corporation AS, le transporteur aérien, a refusé de dédommager le Service des enquêtes pour ces frais supplémentaires, ce qui a conduit ce dernier à saisir le tribunal pour obtenir réparation.

Le Service des enquêtes spéciales a initialement saisi le Premier Tribunal de District de Vilnius (Vilniaus miesto 1-asis apylinkės teismas) pour obtenir la condamnation d’Air Baltic Corporation AS au paiement de 1 168,35 litas lituaniens (environ 338 euros) à titre de dommages et intérêts. Le tribunal a fait droit à cette demande par un jugement rendu le 30 novembre 2012. Air Baltic a fait appel de ce jugement devant le Tribunal Régional de Vilnius (Vilniaus apygardos teismas), qui a rejeté l’appel et confirmé le jugement de première instance par un arrêt du 7 novembre 2013. Air Baltic s’est ensuite pourvue en cassation devant la Cour Suprême de Lituanie (Lietuvos Aukščiausiasis Teismas), soutenant qu’une personne morale telle que le Service des enquêtes ne pouvait pas se prévaloir de la responsabilité du transporteur aérien prévue par l’article 19 de la Convention de Montréal. La Cour Suprême de Lituanie a sursis à statuer et a posé à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) deux questions préjudicielles concernant l’interprétation des articles 19, 22 et 29 de la Convention de Montréal.

La première question portait sur la responsabilité du transporteur aérien envers les tiers, notamment l’employeur d’un passager, pour les dommages résultant d’un retard de vol. La seconde question, posée dans l’hypothèse où la réponse à la première question serait négative, concernait la possibilité pour ces tiers d’agir contre le transporteur aérien sur d’autres fondements, par exemple le droit national. La CJUE a rendu sa décision le 17 février 2016, interprétant les articles de la Convention de Montréal de manière à inclure la responsabilité du transporteur aérien envers les employeurs pour les dommages subis en raison des retards de vols de leurs employés.

En conséquence, la CJUE a répondu à la première question en affirmant que le transporteur aérien est responsable des dommages résultant des retards de vols effectués par les employés en vertu d’un contrat de transport international conclu avec l’employeur. La Cour a jugé que la Convention de Montréal s’applique non seulement aux dommages subis par les passagers, mais aussi à ceux subis par une personne en sa qualité d’employeur ayant conclu un contrat de transport international. Les employeurs peuvent donc être indemnisés pour les frais supplémentaires causés par les retards de vol des employés transportés.

Conclusion : La Convention de Montréal doit être interprétée de manière à inclure la responsabilité du transporteur aérien envers les employeurs pour les dommages subis en raison des retards de vols de leurs employés, dans les limites fixées par la convention.

Décision : CJUE, 17 février 2016, n° C-429/14, Affaire Air Baltic Corporation AS c. Lietuvos Respublikos specialiųjų tyrimų tarnyba.

Responsabilité du Transporteur Aérien en Cas de Retard de Vol International au Cameroun

À la suite d’un retard significatif d’un vol international au départ de Douala (Cameroun), un passager a été contraint d’annuler son voyage et a obtenu le remboursement de son billet d’avion. Considérant les désagréments subis, le passager a engagé une action en responsabilité contre le transporteur aérien pour le retard subi avant l’annulation de son vol.

La Cour d’Appel du Littoral, dans son arrêt n° 107/CIV du 17 juin 2016, a condamné Air France à verser une indemnité de 4 150 Droits de Tirage Spéciaux (DTS), soit 3 412 282,14 F CFA, en plus de 178 500 F CFA pour le remboursement des frais de déplacement et de location de véhicule. Cependant, Air France a formé un pourvoi en cassation, contestant cette décision sur trois motifs principaux.

Sur la forme, Air France a avancé que l’arrêt de la Cour d’Appel manquait de fondements suffisants, conformément à l’article 35.1 c de la Loi 2006/016 du 29 décembre 2008, régissant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême. La compagnie a affirmé que la Cour d’Appel n’avait pas suffisamment démontré que le passager avait subi un réel préjudice, surtout qu’il avait annulé son vol et obtenu un remboursement. Selon Air France, ce manque de démonstration rendait la décision non conforme à l’article 7 de la loi n° 2006/015 sur l’organisation judiciaire au Cameroun, qui exige des décisions judiciaires bien motivées.

Par ailleurs, Air France a soutenu que la Cour d’Appel avait dépassé les limites de responsabilité fixées par l’article 22 de la Convention de Montréal en octroyant une indemnité ainsi qu’un remboursement des frais de déplacement et de location de véhicule. Selon la compagnie, la limite de 4 150 DTS couvre tous les dommages subis par le passager et aucune somme supplémentaire ne devrait être accordée à quelque titre que ce soit.

De plus, Air France a contesté la conversion des Droits de Tirage Spéciaux (DTS) en francs CFA faite par la Cour d’Appel, affirmant que la méthode de conversion n’était pas clairement justifiée. Cela, selon la compagnie, empêchait la vérification de la légalité de cette conversion telle que disposée à l’article 23 de la Convention de Montréal.

Ainsi, la Cour Suprême était saisie de la question du régime de responsabilité du transporteur aérien en cas de retard de vol international, notamment si la Cour d’Appel avait correctement interprété et appliqué les dispositions de l’article 22 de la Convention de Montréal, ainsi que les exigences de motivation des décisions judiciaires prévues par la loi camerounaise.

Sur la base de l’article 53 (2) de la loi n° 2006/016 du 29 décembre 2006, fixant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême, celle-ci a rejeté le pourvoi d’Air France. La Cour Suprême a jugé que les arguments d’Air France n’étaient pas suffisamment clairs et détaillés. Les premier et troisième arguments n’identifiaient pas clairement les textes de loi spécifiques qui auraient été violés. Le deuxième argument, basé sur l’article 22 de la Convention de Montréal, reposait sur une interprétation erronée de la manière dont les limites de responsabilité devaient être appliquées. La Cour Suprême a estimé qu’Air France avait mal interprété l’article 22 de la Convention de Montréal. Cet article limite la responsabilité des transporteurs aériens en cas de retard, mais Air France a mal compris les conditions et l’application de cette limitation. La Cour d’Appel a correctement interprété l’article en considérant que la limitation ne s’appliquait pas de manière absolue et que des indemnisations supplémentaires pouvaient être justifiées en fonction des circonstances spécifiques du cas.

 L’arrêt de la Cour Suprême du Cameroun constitue une illustration significative de l’application des conventions internationales relatives au transport aérien par les juridictions africaines. Il souligne la rigueur avec laquelle ces juridictions évaluent les préjudices allégués et les indemnisations appropriées, contribuant ainsi à l’amélioration de la justice aérienne en Afrique. 

Référence Arrêt : Cour Suprême du Cameroun, Chambre Judiciaire, Section Civile, Dossier n° 078/CIV/017, Pourvoi n° 313/REP du 12 octobre 2016, Arrêt n° 74/Civ du 04 juillet 2019, Affaire : Compagnie Air France c/ Y. François

Exonération de Responsabilité des Transporteurs Aériens en Cas de Grève : Limites et Obligations Subsistantes

Deux passagers ont acheté des billets d’avion pour un vol annulé par la compagnie, invoquant un mouvement de grève des contrôleurs aériens. Les demandeurs ont alors sollicité des indemnités pour l’annulation du vol et des dommages-intérêts pour défaut de fourniture de mesures d’assistance et absence de remise de notice informative, en se basant sur le règlement (CE) n° 261/2004.

Le juge d’instance a rejeté leurs demandes et la Cour de cassation a décidé que la grève n’est pas une circonstance exceptionnelle exonérant la compagnie de son obligation d’indemnisation. Le transporteur doit prouver que l’annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même en prenant toutes les mesures raisonnables.

La Cour de cassation a également souligné que l’existence de circonstances extraordinaires peut exonérer le transporteur de son obligation d’indemnisation, mais ne le dispense pas de ses autres obligations, notamment celles d’assistance et de remise de notice.

Cette décision réaffirme les exigences strictes de preuve imposées aux transporteurs aériens pour s’exonérer de leur obligation d’indemnisation en cas de circonstances extraordinaires, en particulier les grèves. Elle rappelle également que, même en présence de telles circonstances, les transporteurs doivent toujours remplir leurs obligations d’assistance et d’information envers les passagers, renforçant ainsi la protection des droits des passagers aériens.

Référence : Cour de cassation – première chambre civile – 16 février 2022 – 20-14.190

Indemnisation des passagers aériens pour retard de vol dû à une urgence médicale qualifiée de circonstance extraordinaire

Une compagnie aérienne peut-elle s’exonérer de l’obligation d’indemnisation en invoquant une circonstance extraordinaire, si elle n’établit pas avoir pris toutes les mesures raisonnables et proportionnées pour éviter le retard ?

Un passager a acheté un billet d’avion pour un vol reliant Hong-Kong à Paris Charles de Gaulle, prévu pour le 6 août 2014 à 00h50. Trois heures et trente minutes après le décollage, une urgence médicale impliquant une passagère enceinte a contraint l’avion à retourner à Hong-Kong. Le vol a été reprogrammé et a finalement décollé à 22h30 le même jour, entraînant un retard d’environ 22 heures à l’arrivée à Paris par rapport à l’heure prévue.

Le passager a poursuivi Air France pour obtenir une indemnisation en vertu du règlement (CE) n° 261/2004. Répondant favorablement à la demande du passager, le tribunal d’instance d’Aulnay-sous-Bois a constaté que l’urgence médicale constituait une circonstance extraordinaire, mais a jugé que la compagnie aérienne n’avait pas démontré avoir pris toutes les mesures raisonnables pour réacheminer les passagers dans un délai plus court et éviter ainsi le retard. Air France a formé un pourvoi contre ce jugement, arguant que le transporteur aérien est exonéré de son obligation d’indemnisation des passagers en vertu de l’article 7 du règlement (CE) n° 261/2004, lorsque le retard du vol est dû à des circonstances extraordinaires telles qu’une urgence médicale et la nécessité de respecter la réglementation sur le temps de repos de l’équipage.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la compagnie aérienne. En se fondant sur les dispositions de l’article 5, paragraphe 3, du règlement n° 261/2004, la Cour a statué qu’un transporteur aérien n’est pas tenu de verser l’indemnisation prévue à l’article 7 s’il prouve que l’annulation ou le retard du vol est dû à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises. Selon la Cour, et conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, le transporteur aérien doit démontrer que, même en mettant en œuvre tous les moyens en personnel, matériel et financiers dont il disposait, il n’aurait pas pu éviter le retard sans consentir à des sacrifices insupportables par rapport aux capacités de son entreprise à ce moment-là (arrêt du 4 mai 2017, Pesková et Peska, C-315/15).

Cet arrêt réaffirme les conditions strictes dans lesquelles les compagnies aériennes peuvent être exonérées de leur obligation d’indemnisation en cas de retard de vol. Il souligne l’obligation pour les transporteurs de démontrer qu’ils ont pris toutes les mesures raisonnables pour éviter de tels retards, même en présence de circonstances extraordinaires, et clarifie la portée de la notion de « circonstances extraordinaires » au sens du règlement (CE) n° 261/2004.

Référence : Cour de cassation – première chambre civile – 17 février 2021 – 19-20.960

Perte de Bagages dans le Transport Aérien International au Burkina Faso : Application des Clauses de Limitation de ResponsabilitéJurisprudence – Droits des passagers aériens

Mme A Ab a acheté un billet d’avion électronique auprès de la société Air France pour un vol de Ac à Ad via Paris à destination de B. À son arrivée, elle a constaté la perte de ses deux valises, chacune pesant 23 kg. Mme A Ab a demandé une indemnisation à Air France pour la perte de ses bagages, le remboursement de son billet d’avion, les frais d’hôtel, les frais de transport urbain et la valeur de ses effets personnels. Elle a saisi le Tribunal de Grande Instance (TGI) de B, qui, statuant en première instance, a condamné Air France à lui verser la somme totale de seize millions cinq cent huit mille sept cent vingt (16 508 720) francs CFA.

Air France a interjeté appel de ce jugement devant la Cour d’appel de Ouagadougou, contestant la décision du TGI de B. La compagnie aérienne a soutenu que le litige relevait de la matière commerciale et non civile, et que la décision devait être annulée en raison de la non-application de la Convention de Varsovie et de ses clauses limitatives de responsabilité. Air France a argumenté que le tribunal avait statué à tort en matière civile alors que toutes les parties étaient commerçantes. Toutefois, la Cour d’appel a confirmé que le jugement était bien de nature commerciale et qu’il s’agissait d’une simple erreur matérielle.

De plus, Air France a fait valoir que la perte de bagages devait être indemnisée selon les termes de la Convention de Varsovie, limitant la responsabilité à 17 Droits de Tirage Spéciaux (DTS) par kilogramme, sauf déclaration spéciale de valeur faite lors de l’enregistrement. Air France a également souligné que le billet électronique de Mme A Ab, bien que ne contenant pas explicitement les clauses limitatives de responsabilité, faisait référence à celles-ci via un fourreau détachable contenant toutes les conditions du transport aérien.

La Cour d’appel a partiellement infirmé le jugement rendu par le TGI de B. Elle a reconnu l’erreur matérielle mais a confirmé que le jugement avait bien une nature commerciale. Concernant la responsabilité limitée du transporteur, la Cour a appliqué la Convention de Varsovie, limitant l’indemnisation à 17 DTS par kilogramme, ce qui correspond à un montant total de 806 827 francs CFA pour les bagages perdus. Par ailleurs, la Cour a annulé les indemnisations supplémentaires accordées par le TGI, notamment le remboursement du billet d’avion, les frais d’hôtel, les frais de transport urbain et les dommages-intérêts, estimant qu’il y avait une double réparation pour le même préjudice.

Cet arrêt réaffirme que les clauses de limitation de responsabilité du transporteur aérien s’appliquent, même en l’absence de mention explicite sur le billet électronique, tant que ces clauses sont accessibles au passager. La décision établit également que les demandes indemnitaires pour perte de bagages doivent respecter les limitations prévues par les conventions internationales, en l’absence de déclaration spéciale de valeur par le passager.

Cour d’Appel de Versailles,arrêt n° réputé contradictoire du 26 AVRIL 2024 N° RG 23/03712 – N° Portalis DBV3-V-B7H-V4XT, Affaire : XXX C/ Société DIAC

Les mesures imposées dans le cadre d’une procédure de surendettement, doivent être adaptée aux circonstances spécifiques et aux besoins fondamentaux du débiteur et de sa famille pour préserver leur qualité de vie.

Le cabinet a accompagné un débiteur dans le cadre d’une procédure de surendettement dont les mesures imposées par la commission de surendettement avaient été contestées par un créancier.

Un débiteur en situation de surendettement avait été condamné par le tribunal de première instance à vendre son véhicule Dacia Duster pour régler ses dettes à la suite d’une contestation des mesures imposées par la commission de surendettement.

Selon le juge des contentieux et de la protection, l’achat d’un véhicule neuf peu de temps avant le dépôt d’un dossier de surendettement était qualifiée comme étant une dépense excessive, par un débiteur en congé parental, qui n’avait pas une utilisation impérative de la voiture pour son travail.

Le débiteur a fait appel de cette décision, arguant que la vente du véhicule n’était pas proportionnelle à sa situation personnelle, professionnelle et familiale, et pouvait compromettre son niveau de vie ainsi que celui de sa famille.

Ainsi la Cour d’Appel de Versailles devait évaluer si, l’obligation de vente d’un véhicule ordonnée en instance dans le cadre d’un rétablissement personnel lié au surendettement, respectait le principe de proportionnalité qui impose de maintenir une qualité de vie décente du débiteur et sa famille dans le cadre du remboursement de ses dettes.

En bref, l’obligation de remboursement de dettes dans le cadre d’une procédure de surendettement doit-elle tenir compte de la situation personnelle du débiteur et sa famille ?

La Cour d’Appel de Versailles juge que les mesures de remboursement de dettes pour un débiteur surendetté doivent être évaluées en fonction des circonstances personnelles de ce dernier et de sa famille, afin de ne pas compromettre leur qualité de vie.

« Un crédit contracté pour l’achat d’un véhicule neuf peu de temps avant le dépôt d’un dossier de surendettement n’est pas considéré comme excessif pour un débiteur en congé parental sans nécessité absolue d’utiliser une voiture pour le travail, lorsque les mesures imposées n’affectent pas ses conditions minimales de vie ainsi que celle de sa famille. 

L’assistance d’un avocat est cruciale lors d’une procédure de surendettement, particulièrement quand il y a contestation sur la légitimité ou la nature des mesures imposées.

Cour d’Appel de Versailles,arrêt n° réputé contradictoire du 26 AVRIL 2024 N° RG 23/03712 – N° Portalis DBV3-V-B7H-V4XT, Affaire : XXX C/ Société DIAC